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Un message très personnel – Flint Dimanche #14

Chèr(e) toi,

Ce dimanche, à quelques jours de cette fin d’année, j’ai envie de te parler directement. Juste à toi.

D’abord pour te dire que je pense à toi, même si me suis imposé une pause de deux semaines. Pause que, comme tu le constates, je ne respecte pas ! Mais les contraintes nous rendent créatifs…

Je pense à toi, c’est vrai.  Ça va te sembler bizarre. Ou démago. Je sais que vous êtes près de 17000 à revoir cette newsletter, quelques 5000 à la lire vraiment, mais j’ai à chaque fois l’impression d’écrire une lettre à un individu, pas à une audience.

Je t’écris à chaque fois avec précaution. Je pèse chacun de mes mots. J’écris dix pages et j’en efface neuf. Parce que je sais à quel point le mail est un media intrusif, dont beaucoup ont abusé. Alors j’essaie d’être à la hauteur du temps que je te vole.

J’aime me dire que j’écris une lettre intime à chacun d’entre-vous, même si c’est toujours la même répétée 17000 fois.

Je t’écris une lettre personnelle depuis maintenant 14 semaines, et je bondis de gratitude à chaque fois que je reçois une réponse. Même quand je manque de temps, je les mets de côté pour les lire plus tard, même s’il m’arrive de répondre deux semaines après. Chacune de ces lettres est un cadeau d’intelligence.

Depuis que j’ai commencé cette expérience du dimanche, je crois que ce que j’ai le plus aimé, c’est de lire les lettres que je recevais en retour.

Je ne sais pas encore très bien ce que je ferai de tout ça en 2020, mais j’ai bien envie de continuer. Et de voir où ça nous mène. Tout ce travail demande du temps, tu t’en doutes, donc de l’argent. Et je sais bien que l’on ne gagne pas d’argent à être juste généreux. Pourtant, je ne peux me résoudre à abandonner cette réflexion que nous avons entamé ensemble, parce que je pense qu’elle est nécessaire, et qu’elle mérite d’être poursuivie, améliorée, renforcée.

L’année 2020 sera pour nous, pour Flint, l’année de toutes ces interrogations. Nous avons lancé ce projet avec 50K€ en poche. Trois ans après, nous sommes encore là. Nous n’avons pas voulu lever d’argent, malgré tout le buzz qui tournait autour de l’intelligence artificielle, parce que nous voulions d’abord construire quelque chose d’honnête.

Nous avons, Thomas Mahier et moi, beaucoup sacrifié de nos vies personnelles et de notre confort financier dans ce projet. Et quand nous avons eu la possibilité de nous indemniser il y a quatre mois, nous les avons réinvestis pour continuer. Mon banquier s’en arrache encore les cheveux.

Je pense que nous avons eu raison de le faire.

Habitué des médias populaires, c’est la première fois que je choisis de prendre le temps de bâtir un projet selon les valeurs que nous partageons avec Thomas. Sans doute la mort brutale de notre associé et ami au début de l’aventure nous a-t-elle fait changer d’algorithme.

Nous pressentions, déjà en 2016, qu’il y allait avoir un problème avec l’information. Que nous allions en avoir de plus en plus besoin, mais qu’elle allait être de plus en plus difficile à trouver… et à croire.

Nous n’avions pas la réponse, juste un prototype. Nous nous sommes dit que résoudre ce problème nous demanderait du temps. Et que nous aurions besoin de toi.

J’ai douté des milliers de fois. Ce n’est pas facile de s’imposer de prendre le temps quand on a que 50K€. De lancer une « startup » qui dirait : « on sera prêts dans 3 ou 5 ans », tout en refusant de lever des fonds.

Pas facile d’assumer de ne pas être en croissance forte quand c’est le critère dominant. Pas facile de faire une croix sur son train de vie de consultant (pour moi) ou d’ingénieur star (pour un type du niveau de Thomas). De continuer à communiquer mais sans pouvoir afficher sur Instagram cette image de celui à qui tout réussit.

Pas facile de persévérer quand on ne sait pas soi-même si on prend le bon chemin. Pas facile d’avancer pas à pas.

Aujourd’hui je doute encore. Mais quand nous regardons le résultat de ces trois années, Thomas, Clémence (celle qui a dessiné les robots) et moi, nous avons cette fierté. Celle d’avoir réussi à créer la meilleure plateforme de tri d’information du monde. A force de patience et d’esprit collaboratif.

Nous avons aussi compris le « bien s’informer » serait un enjeu majeur des années à venir. C’était une idée difficile à faire passer en 2017. Elle est désormais au coeur de tous les débats, même si tout le monde ne comprend pas très bien ce que ça veut dire.

Ça ne va pas sonner start-up ce que je vais te dire, mais j’aimerais faire de Flint un outil de résistance. Un peu comme dans Star Wars, tu vois. On ne l’appellerait pas « A New Hope » (un nouvel espoir) mais « A News Hope » (l’espoir de l’information). Un outil refuge, d’abord technologique bien sûr, mais pas que. Qui nous informe sans nous enfermer dans un confort.

Je rêve surtout d’une technologie qui nous appartiendrait un peu, à tous, qui nous ferait grandir au lieu de juste nous manipuler pour nous vendre plus de publicités . Qui associerait la puissance de l’intelligence artificielle à la richesse de l’humain.

Une plateforme capable de nous donner le meilleur, mais aussi de nous interroger en permanence. De nous permettre de développer ensemble notre esprit critique.

Et puis qui nous fasse aussi nous rencontrer en vrai. Nous confronter et nous enrichir.

Alors, ok tu vas me dire, mais quel est le modèle économique ? Il se trouve que nous l’avons. Depuis 2 ans, Flint propose sa technologie aux professionnels et aux entreprises. La plupart de ces partenaires des premiers jours ont renouvelé leur abonnement et sont nos premiers soutiens. Nous devons juste faire connaître cette offre. On a plein d’autres modèles en tête, mais celui-ci marche déjà très bien et nous permettrait de poursuivre notre mission auprès d’un public de plus en plus large. Nous avons tout simplement besoin d’investir pour faire « savoir notre savoir-faire » comme on dit.

C’est pour cela que nous avons décidé d’aller chercher de l’argent en 2020.

J’ai un peu la trouille, parce qu’on ne sait jamais, parce que je ne suis pas sûr d’être la bonne personne pour faire de cette expérience un succès, mais je m’en voudrais de ne pas avoir essayé.

Parce que, tu comprends, en plus, on ne veut pas lever avec n’importe qui. Même si ça nous arrangerait bien, là maintenant.

Parce qu’on veut être utile avant d’être une licorne. Et parce qu’on veut continuer à construire ce projet avec toi.Comme on l’a toujours fait.

Alors en 2020, on va avoir besoin de tes conseils, de ton réseau, de tes critiques aussi.

Peut-être que ça ne sera pas suffisant. Peut-être nos convictions ne suffiront-t-elles pas. Peut-être devrons nous fermer boutique dans un an. Mais au moins nous aurons essayé. Et nous aurons osé de te le dire. Et construire ça avec toi.

Tu peux déjà prendre contact avec moi en m’envoyant un mail (benoit @ flint.media) et me donner tes conseils. Ou m’inviter à prendre un café.

Je t’en reparlerai en détail en janvier, si ça t’intéresse, avec un exercice de transparence totale : nos chiffres, notre business plan, et nos idées les plus folles. Je suis sûr que tu sauras nous aider.

D’ici là, je te souhaite une magnifique fin d’année.

Et je te laisse avec ces mots magnifiques d’un des plus grands chorégraphes du XXème siècle.

C’est un petit livre qu’on m’a offert à Noël. Je dois t’avouer que je suis un très mauvais danseur (vraiment très mauvais), mais ces mots m’ont inspiré à défaut de m’aider à mieux danser.

Ils me guideront, je pense, en ce début d’année, sans jamais cesser de m’interroger.

Je t’en fais cadeau.

 « Je crois que la liberté, dans l’art, c’est de surmonter ses contraintes et non pas de les esquiver. Une liberté que l’on n’a pas conquise n’est pas une liberté ».

« La permissivité est le pire obstacle pour un artiste. Toute contrainte nous oblige à des ruses inouïes. Toute censure fait travailler l’imagination, et la révolte qu’elle entraine est source d’inspiration.  Même le manque de moyens donne des idées, et une idée vaut toujours mieux qu’un décor somptueux qui a coûté beaucoup d’argent. »

(Maurice Béjart, « Lettres à un jeune danseur », éditions Actes Sud)

Ce billet est un extrait de la newsletter hebdomadaire « Flint Dimanche », qui explore avec toi comment nous pouvons mieux nous informer dans un monde rempli d’algorithmes. Pour la recevoir, abonne-toi à Flint ici. Tu recevras également une sélection de liens personnalisée, envoyée par l’intelligence artificielle de Flint.

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