Bonjour, je suis Benoît Raphaël, co-fondateur de Flint.
Depuis que j’ai commencé Flint Dimanche, il n’y a pas eu une semaine sans qu’un événement faisant la Une de l’actualité ne soit brouillé par un orage de fake news ou d’interrogations sur la véracité des informations.
Cette semaine, on a franchi un cap encore plus intéressant : l’événement lui-même était une fausse information. Elle ne venait pas des Russes, mais de vrais journalistes très sérieux. Le Parisien d’abord, qui a publié la fausse info, et puis l’Agence France Presse qui a confirmé. Et ensuite tous les médias. Et puis après Twitter, comme d’hab’. On a même eu droit aux théoriciens du complot qui remettaient en cause, non pas l’info en elle-même, mais le fait qu’elle ne sorte que maintenant : « comme par hasard ! » en pleine polémique sur l’explosion de l’usine Lubrizol. Bon…

J’ai évidemment tout de suite interrogé mes robots pour voir comment ils s’en sortaient avec ce bordel. Évidemment, ils se sont fait avoir comme tout le monde, plaçant même en tête l’article à l’origine du fiasco. Preuve qu’il nous reste encore un peu de boulot à faire avant de laisser l’intelligence artificielle nous guider toute seule, sans contrôle, dans le chaos de l’information. Tu me diras, avec les humains c’est pas gagné non plus.

Mea-culpa (ou pas)…
Si tu veux lire les explications du Parisien sur le pourquoi de « l’arrestation mais en fait non » de Xavier Dupont de Ligonnès, c’est ici. Mais elles ne disent rien d’autre que ce que raconte également l’édition écossaise du Sun : les journalistes ont beau dire qu’ils ont croisé leurs sources, ces sources ne pouvaient confirmer qu’une seule « info » : c’est à dire celle d’une seule source, la police écossaise qui pensait avoir arrêté le fugitif. La suite, c’est à dire l’effondrement de cette info, n’est que la conséquence de la vérification de cette affirmation erronée par… policiers eux-mêmes.
Un robot pour corriger l’info ?
Je me suis dit qu ‘on pourrait peut-être essayer d’entrainer un robot « sagesse de l’info » qui par exemple mettrait automatiquement le conditionnel quand une affirmation est publiée sans autre source que les sources policières. Un peu compliqué à développer, mais le simple fait d’y penser nous dit quelque chose sur la fragilité de la fabrique de l’info. Et qu’un « fait », même vérifié, n’est pas forcément une info.
Bon tu me diras que les humains devraient être capable de faire ça, mettre au conditionnel ou, par exemple, ajouter un petit point d’interrogation dans ce genre de situation. Il y en a un d’humain, qui l’a fait. Un seul je crois. C’est le journaliste marseillais qui s’occupait de la Une de La Provence. OM-PSG = 1-0 (oui je sais, c’est facile…).

L’OUTIL BIEN PRATIQUE

Alors on va te dire que c’est la faute à « de moins en moins » de journalistes, mais peut-être pas en fait. Ça ne date pas d’hier, les bourdes (pas si fréquentes) de la presse papier et de l’AFP. Tout comme « l’emballement médiatique » des télés et des radios (et maintenant Twitter), qui ne manque JAMAIS de se déclencher. Pourquoi ? Parce que les trois derniers se bornent la plupart du temps à illustrer ou à commenter la matière brute des des deux premiers. Depuis 2000, le nombre de journalistes en presse écrite a baissé de 5%, alors qu’en télé il a progressé de 58%. Qu’en conclure ? Si tu veux jouer avec des vrais chiffres et te faire ta propre opinion, tu peux utiliser cet outil très clair de l’Observatoire des métiers de la presse.
LE PODCAST À EMPORTER

Un peu d’optimisme et des solutions :
Ce n’est pas tant le journalisme qui a changé, ni même leur nombre, que le monde qui nous entoure. Alors c’est peut-être la façon de faire du journalisme qu’i faut changer. Ce podcast raconte comment le quotidien La Montagne a mis de côté son rôle d’observateur des trains qui n’arrivent pas à l’heure pour essayer de trouver des solutions. En forçant par exemple le patron de la SNCF a rencontrer les usagers et à mettre sur la table plusieurs millions d’euros pour améliorer une ligne laissée à l’abandon. Est-ce le rôle d’un média local ? Tu me diras ce que tu en penses.
Écouter le podcast ici (26mn)
LA VIDÉO QUE TU AS FAILLI RATER

Mais qu’il faut avoir vue parce que c’est bon de rire de ce qui fait peur: Les fake news on peut aussi en rire, ne serait-ce que pour nous faire réfléchir sur ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas.
Un imitateur américain a collaboré avec le youtubeur ShamOOk, pas très connu mais assez doué en « deepfake », tu sais cette technologie un peu flippante qui permet de faire faire ou dire n’importe quoi en vidéo à n’importe qui grâce à l’intelligence artificielle. Dans cette performance étonnante, Jim Meskimen imite tour à tour une vingtaine de célébrités tandis que son visage se transforme en George W Bush ou Robert de Niro.
Voir la vidéo (2mn29)
LE PROJET À SOUTENIR

De la gentillesse dans ce monde de brutes : Là, ce n’est pas Flint qui a trouvé cette histoire, c’est moi. Catherine et Philippe ont monté leur entreprise à 60 ans, et ont du mal à lever des fonds alors que leur projet cartonne et rend les gens heureux. Pourquoi ? Parce qu’ils sont trop vieux. Leur histoire est super jolie et m’a tellement ému que je l’ai racontée sur LinkedIn. Elle nous dit quelque chose sur la vie, sur la vieillesse, mais aussi sur l’amour.
Lire leur histoire et illuminer ton dimanche (7mn)
PARTICIPE !

Ce rendez-vous du dimanche, mi-humain, mi-robot, on le construit ensemble. La semaine dernière j’ai encore reçu beaucoup d’encouragements et de conseils. Mais aussi des critiques. Par exemple, certains ont trouvé que sur l’histoire de Lubrizol j’avais été trop subjectif et n’avais pas assez mis en avant les opinions contradictoires. Alors je demande : et si on demandait à nos robots de trier les infos selon une tonalité « pour » et en « contre », ou « droite » et « gauche » ? C’est compliqué à faire parce que la réalité n’est pas aussi binaire. Mais tu en penses quoi ? On creuse cette idée ?
Tu peux donc faire évoluer cette newsletter en répondant ce mini questionnaire. Tu peux noter chaque rubrique, commenter et faire des propositions sur à peu près tout. Même sur le fait que, en fait, je suis trop long. Le but c’est d’apprendre à mieux nous informer ensemble, donc j’ai besoin de tes critiques.
Tu peux aussi me parler directement en répondant à ce mail (ou en m’écrivant à benoit@flint.media). Je réponds à tout le monde et j’adore ça.
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